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harcèlement de rue

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Il y a une semaine tout pile, j’étais effondrée, apeurée et traumatisée. Oui, rien que ça. Cela explique d’ailleurs que j’ai été beaucoup moins active pendant 1 grosse journée sur les réseaux, à part un tweet pour faire part de mon expérience.

En allant au travail, sur le trajet que j’emprunte quasiment tous les jours, j’ai été agressée.

Je vous rassure, pas de violence ou d’atteinte physique. Mais la dureté des mots et de l’attitude d’une bande de 5 connards pour qui un short fait de toi une pute.

Le harcèlement de rue, en tant que femme, on a toutes connues ça. C’est horrible à dire, cela ne devrait pas avoir lieu, mais parfois ça devient une situation banale. Quand je sors dans la rue à Marseille, surtout si je suis en jupe/robe/short, je sais que je vais avoir le droit à quelques remarques.

Généralement, ça se cantonne à un « t’es charmante mademoiselle » (avec le regard d’un affamé devant une pièce de boeuf) auquel je réponds un « merci » pour avoir la paix. Le mec est content, il a eu l’attention qu’il voulait et moi je continue mon chemin. C’est quand même triste de devoir remercier un mec qui te prend pour un vulgaire bout de viande pour avoir la paix.

Et puis ce matin là, il fait chaud, très chaud. Je pars au bureau en short, tee-shirt et Vans. Ma tenue de d’habitude, et rien de provoquant. Je prends mon trajet habituel, je passe sur le Vieux Port de Marseille. Il n’y a pas grand monde à 8h du matin, il fait beau, c’est mon petit moment à moi où je me vide la tête avant d’aller au bureau.

Je marche tranquillement quand j’entends un mec me siffler. Il est en voiture. Il se met à rouler doucement, pour être à ma hauteur. On commence avec le schéma habituel du « t’es charmante ». Sauf que ça fait déjà 5 fois qu’on me le dit depuis que je suis sortie de chez moi et là, j’ai pas envie de dire une 6ème fois « merci » à un daleux. Y’a pas d’autres mots, ce mec était un daleux comme les autres. Mais plus agressif.

Je continue donc mon chemin. On passe rapidement du « t’es charmante » à « t’es une pute ». Il pense que ça me plait ou quoi ? Je ne réponds pas. De « t’es une pute », on passe vite à « t’es qu’une grosse pute », « t’es qu’une pute avec ton short », « tu me donnes envie de vomir », « t’es qu’une sale grosse pute, je vais te faire le cul ». Sympa, hein ?

Je continue mon chemin, pas très rassurée. Et puis le moment où je flippe complètement, où mon ventre se noue. Le mec, agacé que je ne réponde pas à ses charmantes paroles, appelle ses potes qui sont de l’autre côté de la rue. 4 mecs, en mode daleux, qui n’attendent qu’une chose : venir me tomber dessus. Le mec leur hurle « eh la pute, on va se la faire ! »

Et là, j’ai vu le moment où j’allais me faire embarquer ou emmerder physiquement. Heureusement pour moi, à ce moment là, deux personnes sont proches de moi sur le port. Je me greffe à eux, leur explique en tremblotant que je me fais harceler depuis tout à l’heure et que les mecs sont agressifs avec moi sans que je les connaisse. On fait un bout de chemin ensemble. Les mecs s’en vont, continuent leur chemin. Et moi, je m’effondre en pleurs.

Premier réflexe après être tétanisée. J’appelle mon chéri. Qui me dit qu’il vient me chercher immédiatement. Je lui dit que je préfère aller au travail, que j’y serai en sécurité dans mon bureau. On se met d’accord, j’y trace et il viendra me chercher.

Ce qu’il fait une vingtaine de minutes après, après avoir quitté précipitamment son boulot. Au bureau, je suis incapable de travailler, je me mets à pleurer en plein milieu de l’open space. Ma boss me renvoie chez moi, dès que mon copain arrive.

J’ai mis une grosse partie de la journée à m’en remettre. Je sais bien que leur attaque n’était pas contre moi, Amélie. Non ils avaient juste envie de faire chier une fille ce jour là. Et c’est tombé sur moi et mon short.

Cela ne va pas m’empêcher de porter des shorts, des jupes, des décolletés. Au contraire. Je sais que ce ne sont que des cons, qui pensent qu’une fille qui n’est pas couverte de la tête aux pieds est une pute. Mais pour le moment, je n’ai plus envie de faire le trajet à pied pour aller au travail. Parce que j’ai encore peur de me faire agresser, et de ne pas être capable de me défendre.

Je pense de plus en plus à prendre des cours d’auto-défense. Mon copain m’a déjà achetée une bombe à poivre que j’ai souvent dans mon sac le soir, quand je sors. Mais là, je me dis que je vais devoir l’avoir avec moi 24h/24, dès que je mets un pied hors de chez moi.

C’est honteux de devoir en arriver là. Attention, j’utilise honteux dans le sens « aberrant ». Je n’ai pas honte d’être une femme, de m’habiller comme je l’entends. Non. Mais j’ai honte parfois d’être dans un pays où, alors que nos grands mères se sont battues pour nos droits, des hommes se comportent comme des animaux préhistoriques et traitent les femmes comme une sous-espèce. Et pour ma part, je vais continuer à m’habiller comme je l’entends, et tant pis si toi , gros daleux, tu penses que je suis une pute. Parce que je suis une femme libre.